Privatisation de la poste

Que vive le service public postal !

La consultation citoyenne organisée par le Comité national contre la privatisation de la poste a obtenu un franc succès. En seulement quelques jours de mobilisation, plus de 2 millions 300 000 personnes en France, 33 176 en Ille et Vilaine (11808 à Rennes, 3385 à Saint-Malo, 2317 à Fougères, 1318 à Dinard, 443 et 355 dans les petites communes de Lanhelin et de Saint-Brolade !) se sont exprimées en votant massivement non au projet de privatisation de la poste. Les Français en effet ne sont pas dupes, ils ont parfaitement compris que la transformation en société anonyme n’était qu’une étape supplémentaire vers le démantèlement complet du service public postal.
La privatisation ne sera que l’aboutissement d’un processus engagé en 1997 par une directive européenne imposant sous le gouvernement français de l’époque dirigé par Lionel Jospin la fin du monopole public. Quelques années plus tard, le Conseil européen de Lisbonne des 23 et 24 mars 2000 (ou siègent Chirac et Jospin) demanda à la Commission européenne d’accélérer la libéralisation des secteurs tels que le gaz, les services postaux et les transports. Ce qui sera fait avec une directive du 10 juin 2002 ( sous le gouvernement Raffarin) qui fixera un calendrier à cette ouverture à la concurrence. Le 4 octobre 2006, la Commission européenne exigera de la France « la suppression de la garantie étatique illimitée en faveur de la poste » expliquant que cette dernière « place l’entreprise dans une position avantageuse par rapport à ses concurrents et crée ainsi une distorsion de concurrence sur un marché en voie de libéralisation ».Un service public qui ne peut plus s’appuyer librement sur son autorité de tutelle n’est plus que l’ombre de lui-même. Il est clair ainsi que si la privatisation proprement dite n’est pas formellement imposée par l’Europe, cette dernière fait ouvertement pression pour l’obtenir ayant de toute façon créé avec la complicité des gouvernements de gauche et de droite les conditions de l’affaiblissement de l’entreprise publique condamnée pour survivre dans un marché concurrentiel à singer le capitalisme privé, obnubilée par les seuls profits et non par l’intérêt des usagers. Le choix se réduit désormais à un service public aux ailes coupées ne pouvant plus s’appuyer réellement sur l’Etat ou bien à la privatisation en bonne et due forme qui bien sûr ne fera qu’aggraver la situation faite aux usagers et aux employés (dont la situation de fonctionnaires ne sera plus qu’un souvenir).

Défendre le service public postal impose en réalité non seulement de s’opposer au changement de statut proposé qui conduira évidemment à la privatisation mais aussi de remettre clairement en cause les politiques européennes qui ont cassé les monopoles des services publics. L’intérêt d’une entreprise publique fonctionnant avec les mêmes critères qu’une entreprise privée est en effet extrêmement limité. Il ne peut s’agir de casser le large front qui s’est levé pour défendre le statut public de la poste (il est nécessaire bien au contraire de le renforcer) mais le débat doit avoir lieu et il est de la responsabilité des organisations syndicales de le mener en toute clarté.

D’autre part se pose dorénavant la question de la continuation de la mobilisation. Comment imposer au gouvernement sarkozyste l’enterrement de son projet ? Les comités s’ils ne veulent pas se contenter d’actions symboliques doivent organiser l’action dans la durée, mener une guérilla systématique réunissant les personnels et les usagers dans un combat permanent contre les fermetures des bureaux de poste (depuis 1997 6000 bureaux ont été remplacés par des points postes chez les commerçants ou par des agences postales à la charge des communes). Des actions d’envergure nationale comme celle de la votation du 3 octobre sont nécessaires. Il est possible de prévoir des grandes journées de défense du service public postal se déclinant sous la forme de grandes manifestations mais cela ne pourra suffire. Faire reculer sur une question aussi emblématique un gouvernement aussi déterminé implique une volonté de vaincre qui se donne les moyens de la victoire. Ne peut -t-on rêver à une grève unitaire des postiers soutenue par l’ensemble du service public et par la population mobilisée, cette dernière refusant par exemple d’acquitter ses factures de gaz et d’électricité (autres services publics jetés en pâture) tant que le projet de privatisation du bien commun que représente le service postal n’est pas abandonné ?

Donnons vie à ce rêve !

Défendons le service public postal et, à travers lui, défendons l’ensemble des services publics (eau, gaz, électricité, télécommunication, courrier, transports, Education… ) !