Voici un petit guide pour vous aider …
La pédagogie est dite « active »
lorsque les élèves sont amenés à agir et à collaborer, dans un cadre défini par l’enseignant·e et sur des objectifs pré-déterminés par lui ou elle avec le programme. Elle s’oppose aux pédagogies « traditionnelles » basées sur l’écoute et l’obéissance à des consignes d’exercisation, de mémorisation et d’évaluation. On devrait plutôt remplacer « traditionnelles » par « pédagogies passives »…car toutes ces pédagogies supposent que les parents fassent avec leurs enfants les expériences nécessaires à la compréhension de tout ce qui n’y est pas enseigné ou que les enfants reçoivent les « savoirs » comme des croyances parmi d’autres.
La pédagogie est dite « alternative »
lorsqu’elle cherche des possibilités qui ne sont pas offertes par l’école publique, en se sortant des carcans de l’État, éventuellement même des carcans du programme, (écoles « de la forêt », écoles « démocratiques », écoles « Steiner-Waldorf », écoles « Montessori »…) Hélas l’alternative, et surtout l’alternative hors contrat, reste réservée aux élèves plus riches et paye ses enseignant·es souvent une misère sociale. En sortant des carcans, ces écoles sortent des financements publics et doivent jongler entre l’argent des parents, et des économies à tous les étages.
La pédagogie est dite « coopérative »
lorsque les élèves sont amené·es non seulement à collaborer (à travailler ensemble dans le même objectif délimité par l’enseignant·e, enfant acteur·actrice de pédagogie active) mais à coopérer (enfants auteurs·autrices d’un projet qu’ils et elles mèneront à bien en partageant les impératifs, les actions, les constructions et la réalisation finale). La nuance est de taille entre collaboration et coopération. On voit bien qu’entre les « collaborateurs et collaboratrices » dans les entreprises et les coopérateurs dans les SCOP, l’engagement n’est pas le même. La coopération suppose de l’enthousiasme, de l’énergie, du progrès partagé afin que chacun puisse y puiser l’énergie de se dépasser dans ses apprentissages.
La pédagogie est dite « de projets »
lorsqu’une part du programme est portée par des actions réelles dans lesquelles les enfants peuvent être acteurs·actrices ou auteurs·autrices. Attention, lorsque le ou la conseiller·e pédagogique ou l’IPR vient vous proposer un « projet » surgelé à décongeler et consommer en classe, ce n’est pas de la pédagogie de projet, parfois les élèves ne sont ni acteurs·actrices, ni auteurs·autrices, ne décident de rien et finissent par faire n’importe quoi le jour de la « restitution » d’un pseudo projet dans lequel ils et elles n’ont rien appris. Un « projet » c’est une action dans laquelle les élèves et l’enseignant·e se projettent, dont ils et elles décident ensemble des modalités, du financement, des actions et de la réalisation finale, ce n’est pas le faire valoir du recteur ou de la rectrice ou du Conseil départemental.
La pédagogie est dite « moderne »
lorsqu’elle est basée sur des savoirs validés, sur des méthodes scientifiques d’expérimentation et d’appropriation et la capacité de la science d’en remettre en cause les résultats. Il fut une époque où on apprenait aux filles surtout à coudre, à broder, à copier, à réciter des prières et à être obéissantes. Marie Curie et Paul Langevin avaient donc décidé d’élever leurs enfants à la science, dans une « école » installée dans leur laboratoire, et animée par des étudiants en sciences et eux même, tant le niveau de « modernité » était faible, surtout pour Pierre et Marie Curie, qui avaient deux filles. Elle s’oppose à la pédagogie « traditionnelle » qui utilise le manuel comme une bible, avec une croyance dans « l’unique source du savoir ». Les BCD, les CDI, les activités de documentation, de réflexion sur les fake news, sur l’information des réseaux sociaux, les expérimentations en sciences, en biologie, en jardinage, dans la nature sont des procédures indispensables pour défendre une modernité qui ne prend jamais une ride.
La pédagogie est dite « expérimentale »
lorsqu’elle tente des fonctionnements qui n’avaient pas encore été tentés, avec des tiers qualifiés pour valider et étudier les effets réels. Donc ni Freinet, ni Montessori ne sont aujourd’hui des pédagogies expérimentales, puisque ce sont des pédagogies anciennes, dont les effets ont déjà été étudiés, repérés, et évalués. Mais l’une comme l’autre évoluent dans la durée, et Freinet aujourd’hui, ce n’est sans doute pas ce qui se faisait dans des classes de 45 garçons de 6 à 14 ans à la campagne dans les années 20.
La pédagogie est dite « émancipatrice »
lorsqu’elle permet aux enfants d’apprendre des choses qu’ils n’auraient pas pu apprendre avec leurs parents, de visiter des lieux dans lesquels leurs familles ne les auraient pas emmenés, de lire des ouvrages, de voir des films, d’écouter des concerts, de comprendre des démarches scientifiques qui échappent à la culture de leurs parents. Bref, il faudrait emmener les enfants de différentes régions, de différents milieux sociaux à se rencontrer et à confronter leurs acquis culturels. Freinet et la correspondance scolaire en a inventé le début.
La pédagogie est dite « critique »
lorsqu’elle permet d’affiner les armes intellectuelles pour lutter contre les oppressions et l’exploitation. Il s’agit de réflexions et d’actions collectives, portées par les élèves, en fonction de leur âge et de leur niveau d’engagement. Le terme « critique » ne doit pas être perçu en négatif. Au contraire, il s’agit d’agir éthique, dans le réel, en réfléchissant aux enjeux.
La pédagogie est dite « Freinet » ou « Montessori » ou « Steiner » ou « institutionnelle »,
lorsque qu’elle prétend se rattacher aux travaux des auteurs ou des courants cités. Mais attention, il n’existe aucun « label » certifiant quoi que ce soit. Bien des gens pensent faire « de la pédagogie Freinet » car ils ont acheté 3 fichiers de travail individualisé, d’autres ouvrent des « écoles Montessori » dans lesquelles les enfants sont avec des « éducatrices » de formation ATSEM avec 5 jours de formation « Montessori » au rabais,…Quand aux « écoles Steiner », certaines sont même des lieux inquiétants, tenus par des personnes sectaires et empreintes de crédulités anthroposophes et anti-vaccination …Toutes ou presque sont des écoles privées sélectives qui prennent des labels « démocratiques », « pédagogie active », « bienveillance », « bilingue » pour construire un apartheid social assumé, tout comme les écoles religieuses dont l’objectif est souvent moins de transmettre des croyances que de mettre des enfants hors de l’école publique, dont le niveau de dégradation finit par effrayer les parents. La plupart de ces écoles ont perdu toute ambition sociale ou militante, même s’il reste quelques Diwan ou Calendreta qui assurent l’enseignement de langues régionales et sont issues des luttes pour défendre ces cultures.
Nous devons nous battre pour permettre à chaque enseignant·e de construire ses propres pratiques pédagogiques, et d’en assumer le questionnement dans des temps de formation, de réunion et de partage avec ses collègues, dans un cadre public, gratuit, et ouvert à tous les enfants, sous la surveillance d’une médecine scolaire qui permette de garantir des conditions d’hygiène et de santé pour tous, avec l’aide de RASED, de CMPP, de SESSAD, de CLAMS, d’ITEP, de classes adaptées et d’AESH qualifiées et titulaires pour tous les enfants qui peinent à apprendre. Tous doivent pouvoir obtenir gratuitement les prises en charge et les étayages dont ils ont besoin, en partageant leur enfance dans les écoles publiques avec tous les autres enfants de leur âge.