À la rentrée 2021 une réforme de fond va affecter les IUT. L’objectif de cette réforme est d’allonger la scolarité jusqu’à Bac+3 pour délivrer un nouveau diplôme appelé B.U.T. pour Bachelor Universitaire de Technologie. Initialement ces établissements avaient pour vocation la formation de technicien-ne-s supérieur-e-s de niveau Bac+2.
À première vue le projet semble alléchant : un allongement des études pour un meilleur niveau de qualification. Mais derrière la façade de nombreux points de la réforme de cette filière sont très inquiétants.
Le nom choisi, un cadeau aux écoles privées
Déjà Le choix de baptiser le diplôme final « Bachelor » interroge. Ce nom est abondamment utilisé par certaines écoles « hors contrat » pour délivrer, moyennant finance, des diplômes de pacotille appelés « Bachelor ». Par le choix d’appeler le diplôme d’IUT « Bachelor » au détriment de « licence » on apporte ainsi une opportunité aux écoles privées qui voudront concurrencer le service public.
Une absence cruelle de moyens
Allonger les études d’une année supplémentaire implique, pour les personnels titulaires, un accroissement de la charge de travail. Ce n’est plus deux, mais trois promotions d’étudiant-e-s qu’ils et elles auront à encadrer et gérer simultanément.
Ce passage à 3 ans ne s’accompagne d’aucune création de postes. Et ceci alors que ces établissements fonctionnent déjà avec un sous encadrement chronique. La situation est actuellement tellement dégradée que les heures postes ne couvrent même plus la moitié des heures nécessaires pour assurer l’enseignement défini dans les référentiels nationaux des IUT. Pour fonctionner ces établissements recourent massivement aux heures supplémentaires et à une armée de non titulaires (vacataires, doctorant-e-s, contrats divers).
Une complexité administrative digne du père UBU
Ce nouveau diplôme de B.U.T. a pour ambition de mettre en application une approche par compétences. L’approche par compétence (A.P.C.) est au départ un fantasme bureaucratique pensé par des gens déconnectés de toute pratique pédagogique. Sa mise en œuvre a pour conséquence une explosion de la complexité des règles qui cadreront ce futur diplôme.
Ainsi par exemple, les années universitaires, déjà sous-découpées en semestre, comporteront plusieurs « blocs de compétence » (de l’ordre de 5 ou 6) par semestre.Mais un bloc de compétence n’est ni une matière, ni un regroupement thématiques de matières ! C’est un mixage de morceaux de matières enseignées. Par exemple, les « compétences » mathématiques pourront se répartir sur plusieurs blocs de compétence.
Les étudiant-e-s livré-e-s à eux-mêmes et elles-mêmes pour développer leur autonomie
Une partie des enseignements se fera sans enseignant-e-s !
Jusqu’à présent cette situation existait dans le cadre des projets qui étaient « tuteurés » et non « encadrés ». Les enseignant-e-s ne sont pas payé-e-s (ou très peu) pour le temps qu’ils et elles passent à enseigner à leurs étudiant-e-s. Cette situation avait pour conséquence que beaucoup d’étudiant-e-s se retrouvaient livré-e-s à eux-mêmes et elles-mêmes.
Avec le B.U.T., cette situation se généralise puisque toutes les matières comporteront une part importante d’enseignements non encadrés mais évalués.
Le message à destination des étudiant-e-s est clair : pour apprendre, débrouillez-vous tout-e-s seul-e-s !
L’avenir ?
Comme on l’a vu, cette réforme se fait sans bourse délier, sans vrai investissement, avec des techniques d’illusionnistes : autonomie des étudiant-e-s pour ne pas payer les enseignant-e-s, complexité administrative pour donner l’illusion de faire mieux.
Les enseignant-e-s devront faire face à un surcroît de travail :
- plus d’étudiant-e-s à encadrer
- plus de complexité administrative
- une autonomie des étudiant-e-s qu’il faut quand même « accompagner »
- Pour la rentrée de septembre 2021, année de mise en place de la réforme, les enseignant-e-s devront soit travailler beaucoup plus pour satisfaire aux exigences de cette réforme, au risque d’arriver à l’épuisement, soit lâcher du lest, accepter une baisse des exigences et par conséquent un déclin du service public.
SUD éducation demande des réformes qui apportent des moyens et en particulier des moyens humains pérennes (des postes statutaires) pour mieux encadrer et aider les étudiant-e-s.
SUD éducation s’oppose fermement à toute réforme visant à dégrader le service public pour faire de l’enseignement supérieur un marché lucratif.