Depuis plusieurs mois, le Ministère de l’Éducation Nationale a ouvert le chantier d’une réforme du statut des enseignant-e-s. Après de nombreux groupes de travail, dans lesquels les représentant-e-s de SUD Éducation ont défendu les intérêts des personnels (en demandant par exemple que les missions liées à l’enseignement soient intégrées dans les maxima hebdomadaires ou en refusant que notre hiérarchie puisse nous imposer des modalités de concertation), le projet a été présenté au Comité Technique Ministériel du 27 mars.
Le décret sur les statuts et les missions des enseignant-e-s dans le second degré a été adopté : 5 voix pour (UNSA et SGEN-CFDT), 4 voix contre (SUD, CGT, FO et SNUEP), 6 abstentions (SNES-SNUIPP-SNEP). Il s’appliquera à compter de la rentrée 2015, sauf ce qui concerne l’éducation prioritaire qui s’appliquera à la prochaine rentrée.
Ce décret a le mérite de rassembler dans un même texte les services et missions de tou-te-s les enseignant-e-s des établissements du second degré, qu’ils/elles soient certifié-e-s, agrégé-e-s, PLP, documentaliste ou PE sur postes spécialisés, en poste fixe ou TZR. Pourtant, il présente des insuffisances et des reculs qui nous ont conduit-e-s à nous y opposer.
Pourquoi SUD Éducation a voté contre ce texte
Service d’enseignement et missions liées
Le nouveau décret prévoit désormais deux types d’obligations de service :
– Un service devant élèves dont le maximum hebdomadaire reste inchangé, y compris pour les documentalistes.
– Les missions non quantifiées liées au service d’enseignement (la préparation des cours, l’aide, le « suivi du travail personnel des élèves », l’évaluation, l’orientation, les relations avec les parents, le travail au sein d’équipes pédagogiques, le travail en équipes pluri-professionnelles…).
Ce que dit SUD
– La reconnaissance des missions liées à l’enseignement et du travail en équipe est une nécessité, cela doit se traduire par une baisse des maxima hebdomadaires de service, le travail en équipe et la concertation devant être inclus dans les maximas de service.
– C’est l’occasion manquée d’étendre aux enseignant-e-s la réduction du temps de travail dont ont bénéficié les autres salariés en 1956, 1969, 1982 et 2000.
Missions particulières
– Toutes les autres tâches supplémentaires (professeur principal, référent informatique, référent culturel…) sont facultatives et ne donneront lieu à décharge horaire que sur accord du Recteur.
Ce que dit SUD
– Pour l’immense majorité des collègues le principe contestable et inégalitaire de l’indemnité est maintenu, au détriment des décharges horaires qui resteront exceptionnelles.
– En cas de décharge, le passage obligatoire par le conseil d’administration limite les risques d’arbitraire des chefs d’établissement.
Décharges de service
– Les enseignant-e-s en poste partagé sur 3 établissements d’une même commune ou sur deux communes différentes, bénéficieront désormais d’une décharge d’une heure, y compris les TZR.
– La décharge de laboratoire est maintenue en SVT et physique-chimie en collège mais supprimée partout ailleurs (en technologie, histoire-géographie, langues…).
– L’heure de chorale ne compte plus double pour les professeur-e-s d’éducation musicale et de chant choral.
– L’heure de première chaire est remplacée par un système de pondération : chaque heure effectuée en cycle terminal sera comptée pour 1,1 heure.
Ce que dit SUD
– La décharge pour service partagé entre plusieurs établissements d’une même commune est une avancée. En revanche, SUD ne peut accepter que soit inscrit dans le décret la possibilité d’affectation sur plusieurs communes, y compris pour les TZR, si cela n’est pas fortement encadré par les circulaires.
– Avec la suppression des décharges disciplinaires, de nombreux personnels verront par contre leur charge de travail augmenter, c’est intolérable.
– Alors que l’heure de première chaire intervenait dès 6 heures d’enseignement en cycle terminal, avec ce texte il en faudra 10 pour obtenir une heure de décharge pleine.
Pondération éducation prioritaire
– Dans des établissements « inscrits sur une liste fixée par arrêté du Ministre » (art. 8), les heures d’enseignement se verront appliquer une pondération de 1,1.
Ce que dit SUD
– Un allègement du temps devant élève en éducation prioritaire va dans le sens des revendications de SUD, mais nous revendiquons une réelle décharge et non une pondération.
– Cette disposition ne concernera qu’une infime partie des établissements de l’éducation prioritaire, ceux classés REP+.
– Le dispositif devrait concerner également les personnels non-enseignants de l’éducation prioritaire.
– Sans créations de postes suffisantes, cette pondération risque de se traduire par des heures supplémentaires au lieu d’une décharge de service.
Aspects spécifiques aux PLP
– Le décret exclut les PLP des pondérations données dans le cycle terminal général et technologique.
– Le texte ne garantit pas que les compléments de service des PLP ne soient pas faits dans les sections d’apprenti-e-s au sein des lycées des métiers (art. 4).
– Les certifié-e-s, agrégé-e-s peuvent enseigner dans n’importe quel établissement alors que « Pour les professeurs de lycée professionnel, ce complément de service ne peut être assuré que dans un établissement scolaire public dispensant un enseignement professionnel » (art. 4).
– Le texte sur les statuts particuliers (art. 8) permet de candidater au détachement dans le corps des PLP sur la base d’une reconnaissance de leur « pratique professionnelle ou d’enseignement » et non exclusivement sur titre et diplôme.
Ce que dit SUD
– Nous dénonçons cette exclusion scandaleuse des enseignant-e-s de la voie professionnelle des pondérations dans les classes d’examen.
– SUD Éducation a été la seule organisation à déposer un amendement visant à empêcher d’imposer des compléments de service dans les sections d’apprentis.
– L’inégalité de traitement sur les compléments de service entre PLP et PLC n’est pas compatible avec notre revendication du corps unique des enseignant-e-s.
– Par contre, les statuts particuliers (art. 8) actent une reconnaissance des années d’expérience professionnelle et d’enseignement professionnel.
Les amendements de SUD Éducation
Conformément à nos orientations fédérales, SUD Éducation siège dans les instances nationales pour porter ses revendications et informer les personnels. Cela ne nous interdit pas de déposer des amendements pour améliorer des textes, y compris si nous votons finalement contre des textes qui, globalement, restent pour nous insuffisants ou régressifs.
Ainsi, lors de ce CTM, sans être dupe, SUD Éducation a proposé des amendements pour maintenir la décharge en cycle terminal dès 6h de cours, les décharges disciplinaires (heures de labo) ou condamnant les compléments de service extérieurs en cas d’HSA dans l’établissement. La plupart des autres organisations syndicales ont suivi SUD Éducation sur ces terrains. SUD Éducation a également soutenu les amendements des autres syndicats quand nous avons considéré qu’ils allaient dans le bon sens.
Sur les 47 amendements soumis au texte, 24 ont été adoptés par les syndicats, parfois à l’unanimité, mais cela n’oblige pas l’administration à les intégrer. Deux seulement (mineurs) l’ont été… Bilan édifiant de ce qu’est le dialogue social pour notre hiérarchie !
Nous avons été la seule organisation à demander l’interdiction des compléments de service s’il reste des HSA dans la discipline. Les autres organisations nous ont suivi-e-s sur ce point. Le Ministère s’est engagé à traduire cette exigence dans les circulaires d’application.
SUD Éducation revendique
- 3h de concertation intégrées dans le service des enseignant-e-s et inscrites à leur emploi du temps, afin de privilégier l’usage de décharge plutôt que le tout indemnitaire.
- Une baisse du temps de travail : travailler moins pour travailler toutes et tous, et travailler mieux.
- Un corps unique pour l’ensemble des personnels enseignants, en l’alignant sur la situation la plus favorable.
- Une réforme de l’éducation prioritaire qui inclut une décharge horaire dans le service de tous les personnels, pour répondre aux spécificités du travail en ZEP et garantir une amélioration des conditions de travail dans les établissements classés éducation prioritaire.
C’est sur le terrain et par nos luttes que nous construirons une autre école !