Rentrée 2013 – Austérité, régressions… Mobilisation !

La rentrée 2012 s’était caractérisée par la carence de plan d’urgence pour l’école et l’absence de rupture avec ce qui avait été programmé sous Sarkozy. Cette rentrée des classes 2013 est la première a avoir été entièrement préparée par V. Peillon. Un an après le lancement du processus de « refondation », malgré quelques corrections, la politique éducative du nouveau ministère est en continuité avec les précédentes. Elle poursuit la mise en œuvre de l’école du socle commun et des compétences, l’adaptation de l’école aux exigences du marché, la dégradation des conditions de vie et de travail des personnels, la territorialisation du service public (à commencer par l’enseignement professionnel) et la précarisation des travailleurs/euses de l’éducation, de la maternelle à l’université. Elle s’inscrit dans le cadre de la politique d’austérité poursuivie par le gouvernement pour répondre aux exigences du patronat.

  • Cette rentrée est d’abord marquée par les effets de la politique anti-immigrée de M. Valls : absence de certain-e-s de nos élèves sorti-e-s de force du territoire avec leurs parents faute de titre de séjour (qui plus est après avoir été retenu-e-s en centre de rétention à l’encontre des droits de l’enfant), élèves à la rue après avoir été expulsé-e-s de leur logement précaire, élèves stigmatisé-e-s et traqué-e-s parce qu’ils sont Roms, Africain-e-s, Maghrébin-e-s ou Asiatiques.
  • Pour 1 élève sur 5, c’est la rentrée chaotique de la réforme des rythmes scolaires dans le primaire. Une réforme bricolée, non financée, inégalitaire, imposée malgré l’opposition qu’elle a suscitée. Le ministre lui-même annonce des couacs prévisibles, en particulier sur le périscolaire, où dans beaucoup de communes les élèves seront en sureffectifs avec des personnels mis en difficulté, sans formation ni qualification adaptées. SUD éducation a d’ailleurs déposé un recours pour faire annuler le décret Peillon sur les rythmes. En juillet, le Conseil d’État a rejeté notre demande en procédure d’urgence et il doit se prononcer sur le fond dans les semaines qui viennent. Ce sont les mobilisations, dont certaines sont déjà programmées, qui permettront de créer le rapport de force pour imposer des alternatives. Nous leur apporterons tout notre soutien.
  • C’est la rentrée de l’adieu à la promesse des 60 000 créations de postes. Dans le cadre du projet de budget, moins de 10 000 créations de postes sont annoncées pour 2014 dans l’Éducation Nationale et l’Enseignement Supérieur et la Recherche. C’est 14 000 postes annuels qu’il aurait fallu pour recréer les 60 000 postes promis sur la mandature (ce qui ne permettrait même pas de compenser les 80 000 suppressions subies sous Sarkozy, alors qu’il manquait déjà des postes avant la purge). Sans surprise, la promesse ne sera donc pas tenue.

Pire encore, même les postes prétendument créés ne sont pas pourvus. Aux concours de 2013, 1900 enseignant-e-s n’ont pas été recruté-e-s. 14 % des postes « ouverts » dans le secondaire restent vacants. Dans le primaire, quelques 300 postes n’ont pas été pourvus, avec des zones particulièrement touchées : 179 postes sur 1055 non pourvus à Créteil, 34 à Versailles, 28 à Paris… Beaucoup de candidat-e-s au professorat des écoles ont été recalé-e-s par un zéro éliminatoire alors que leurs résultats étaient globalement bons, ce zéro étant parfois attribué dans leur discipline de formation universitaire… Si le ministère avait donné consigne de ne pas pourvoir tous les postes, un grand nombre de recalé-e-s par ce zéro se sont vu-e-s proposer des contrats précaires.

Il y aura donc à la fois des classes sans profs et un développement de la précarité enseignante, avec le recrutement de contractuels, vacataires, etc. Il y a urgence à titulariser les précaires, améliorer enfin les conditions de vie et de travail des enseignant-e-s, par la réduction du temps de travail, la diminution du nombre d’élèves par classe, la fin des pressions hiérarchiques… Il y a urgence aussi à améliorer le niveau de vie des étudiant-e-s.

  • C’est une rentrée où la précarité se développe à tous les niveaux : refus de titulariser les précaires, Assistant de Prévention et de Sécurité, Emplois d’Avenir Professeur… L’effet d’annonce sur la « pérennisation des AVS » ne doit pas masquer qu’il ne s’agit pas de les titulariser sous statut de fonctionnaire, mais seulement de leur accorder éventuellement un CDI de droit privé, après 6 ans d’ultra-précarité en CDD. Cela ne masque pas non plus que beaucoup d’AVS sont aujourd’hui sous contrat aidé et ne sont pas concerné-e-s par la mesure. [1]
  • C’est une rentrée sans restauration des RASED, puisque sur les 5000 postes supprimés il n’en est recréé que 72 – et encore tous ne seront pas occupés faute de places suffisantes en formation ces dernières années.
  • C’est la rentrée de la confusion dans les écoles et les établissements avec les différents statuts des stagiaires, des étudiant-e-s de Master 2 admissibles aux fonctionnaires stagiaires admis.
  • C’est la rentrée de la mis en place de la loi Fioraso sur l’enseignement supérieur et la recherche, qui entérine et amplifie la destruction du service public déjà largement entamée par le système LMD, le Pacte pour la Recherche et la LRU, avec « l’autonomie » concurrentielle et managériale des établissements.

Trois gros chantiers sont ouverts par le ministère pour l’année à venir : l’éducation prioritaire, les statuts et missions, la réforme du collège. Sur le lycée, la réforme de la droite est maintenue, le gouvernement prévoyant cette année d’organiser un bilan avant une réforme peut-être dans les années suivantes. Le Conseil Supérieur des Programmes va commencer ses travaux, sans que nous sachions encore vraiment si les personnels et leurs représentant-e-s y seront réellement associé-e-s.

  • Sur l’éducation prioritaire, le débat est mal engagé puisque le ministère affirme qu’il n’y a pas de problème de moyens…
  • Sur le collège, le ministère programme la séparation du temps des élèves en trois parties : un tronc commun ; des enseignements complémentaires différenciés ; des activités de renforcement (soutien, tutorat, aide personnalisée…). Un tronc commun, cela veut dire des branches distinctes : les différenciations sont notoirement le biais par lequel se réintroduisent des hiérarchisations entre options et parcours qui favorisent la reproduction des inégalités sociales et culturelles. Quant à l’extériorisation hors de la classe du traitement de la difficulté scolaire, elle a été mise en œuvre au primaire et au lycée (aide personnalisée). Dans les deux cas, c’est un échec. Son extension au collège témoigne du renoncement à la création des conditions pour que les difficultés des élèves soient traitées au sein de classe.
  • De toutes parts, la casse des statuts des enseignant-e-s du 1er et du 2nd degrés est programmée. Le ministère prévoit une usine à gaz de 13 groupes de travail avec les organisations syndicales. La Cour des comptes recommande de graves remises en cause : annualisation, toutes et tous remplaçant-e-s, hiérarchie partout, service au bon vouloir des chefs locaux, polyvalence au collège, mobilité forcée inter-degrés, recrutement local, poste à profil pour tout le monde, affectation à la tête du client, salaires au mérite… Elle n’a pas été désavouée par V. Peillon. Et les premiers éléments qui se dégagent des projets ministériels sont sans ambiguïté : au collège, la tripartition du temps des élèves pourrait être l’occasion de revoir à la hausse les maxima de service, sous prétexte par exemple qu’une heure « d’encadrement » d’activités de renforcement ne pourrait être comptée comme une heure de classe… Pour mettre en œuvre sa réforme des rythmes au primaire, le ministère entend définir les obligations réglementaires de service hebdomadaire des PE non plus à 24 heures, mais à « 24h en moyenne, avec récupération ». Ce qui est programmé, c’est donc une flexibilisation du temps de travail des PE, soumis à l’arbitraire des DASEN.
  • Enfin, c’est la rentrée d’une nouvelle attaque sur les retraites : poursuite de la loi Fillon, augmentation de la durée de cotisation jusqu’à 43 annuités, baisse des pensions et des salaires. Il nous faut construire la mobilisation la plus large pour refuser tout nouveau recul.

Pour l’éducation comme pour le reste, le véritable changement dépend de nos mobilisations. La fédération SUD éducation appelle les personnels à se réunir en assemblée générale de rentrée et à participer massivement à la grève et aux manifestations du mardi 10 septembre. La grève et les manifestations du 10 septembre sont la première étape dans la construction d’un mouvement d’ensemble pour changer les rapports de force : par nos luttes, empêchons toute régression de nos droits, imposons l’abrogation des contre-réformes et la satisfaction de nos revendications, pour une autre école, une autre société.