Déclaration de SUD Éducation et de l’Union syndicale Solidaires au CSE du 22 novembre 2012

Que penser de la méthode de cette consultation ?

Les organisations syndicales ne reçoivent pas le projet de texte gouvernemental pour l’étudier et consulter leurs instances, mais doivent l’examiner seulement en audience. Est-il bien sérieux, sur un sujet présenté comme la priorité du nouveau gouvernement, d’enchainer dans la précipitation les séances de jour et parfois de nuit sur une semaine ou moins de 10 jours pour les rythmes scolaires ? A quel moment les organisations auront elles le projet de loi ?

Sur les axes retenus, nous regrettons de voir trop de continuité avec la droite

Vous ne remettez pas en cause l’école du socle même si vous en changez le nom. Le LPC sera maintenu mais dans une version simplifiée, les systèmes de fichage comme base élève aussi. Les contreréformes du système éducatif semblent entérinées sur le bac pro 3 ans, la liquidation programmée de la voie technologique et la réforme du lycée général. Où est la volonté de reprendre le chantier d’une vraie réforme démocratique du lycée ? Sur les contenus c’est jusque-là une grande continuité qui prévaut alors que les programmes de primaire de 2008 mais aussi du secondaire sous Luc Chatel ont été vivement critiqués.

Pire, le Ministre affiche clairement sa volonté de rapprocher l’entreprise de l’éducation. Non seulement il n’est pas prévu d’abroger la convention signée entre l’Education Nationale et le Medef sous le précédent gouvernent, mais il est même question de « co-éducation avec l’entreprise » et le ministre a promis le 15 novembre la création, en 2013, d’un conseil « pour que les chefs d’entreprise soient représentés à l’éducation nationale ». Adapter les formations et les élèves aux besoins des entreprises dès la sixième, organiser un contact des enseignants avec le monde de l’entreprise au cours de leur formation, serait-ce le « nouveau » crédo ? Pour nous, éduquer, ce n’est pas tout subordonner à l’employabilité future des élèves, ni développer les valeur de l’entreprise capitaliste dans l’Ecole.

Parmi les nouveautés annoncées de la loi d’orientation, certaines suscitent notre opposition

Le président de la République vient d’annoncer le 20 novembre l’étalement de la réforme des rythmes scolaires sur 2013 et 2014. S’il a entendu les municipalités, il faut aussi entendre les personnels et ne pas opposer leurs intérêts à celui des élèves. Ainsi nous redisons ici que toucher aux rythmes ne peut suffire à refonder une École dont le fonctionnement accentue les inégalités scolaires. Il faut que le ministère s’engage notamment, sur une baisse des effectifs par classe, le rétablissement de solides réseaux d’aide, une baisse du temps de travail et un temps de concertation pour les équipes, la révision des programmes. Il doit aussi se donner les moyens pour que les enseignants français ne soient pas parmi les moins bien payés de OCDE. Ensuite, si nous sommes favorables à une réduction de la journée scolaire de l’élève , nous ne voyons pas en quoi le projet actuel va dans ce sens, et nous n’accepterons pas une ½ journée supplémentaire sans compensation pour les personnels.

L’acte III de la décentralisation organise le transfert aux régions de la carte des formations de l’enseignement professionnel ce qui sera un moyen pour réduire les formations financées par l’Etat ou d’en régionaliser certaines. Nos inquiétudes sont grandes sur la pérennité des diplômes proposés en dehors des bassins d’emploi et sur l’avenir du statut des personnels dans une décentralisation de l’enseignement professionnel qui ne dit pas son nom. La situation promise aux COP, qui resteraient sous statut national mais devraient désormais choisir entre un travail en établissement et celui pour adultes sous direction de la région, n’est à l’évidence qu’une étape d’une décentralisation que nous dénonçons ; elle va en effet aggraver les inégalités territoriales et remettre en cause les garanties statutaires des personnels.

Au-delà de ces sujets majeurs bien des aspects de votre projet de Loi exigent des réécritures

Ainsi par exemple certains aspects de votre plan numérique, la composition du conseil national des programmes sans représentant-e-s des enseignants, les contrats d’objectifs réaffirmés à l’occasion du décret du 26 octobre sur le cadre budgétaire des EPLE, les entorses de nouveaux possibles au collège unique que vous revendiquiez pourtant…

Mais il faut surtout mentionner les grands oublis du texte

Comment « refonder l ‘École « sans rétablir dans la loi les principes des RASED et de l’éducation prioritaire ni réaffirmer au moins en parallèle l’abrogation du dispositif Eclair ? Rien non plus sur les indispensables modifications de programmes à mettre en chantier notamment dès le primaire si on veut changer l’Ecole.

En dehors du projet de Loi, rien non plus sur les indispensables augmentations des salaires des personnels de l’Education et pas seulement les enseignants ! Rien non plus sur une vraie volonté, nous ne parlons pas là de la loi Sauvadet, de « résorption de la précarité », importante chez les enseignant-e-s et les personnels administratifs, mais au contraire l’utilisation de celle-ci dans votre dispositif « emploi d’avenir professeur » ; la nouvelle promotion de stagiaires 2013-14 fera en dépit des promesses estivales du ministre, une nouvelle rentrée à temps plein ou en M2 en alternance en tant que contractuel 6h. Aucun véritable projet n’apparait non plus pour les personnels AVS, de surveillance (AED)…

Pour nous contrairement à votre communication il y a le signal d’un retrait de l’Etat dans les voies technologique, professionnelle et de l’orientation au profit des régions. Il n’y a pas, bien au contraire, de signal de rupture avec l’idéologie de l’entreprise à l’Ecole et d’un management autoritaire inspiré du privé comme le montre votre projet de conseil pédagogique de cycle CM2-6e.

Au-delà de quelques annonces de tonalité progressiste, nous ne voyons pas de vraie rupture avec la politique du gouvernement précédent, ni sur le fond des politiques éducatives, ni sur l’orientation budgétaire qui permettrait d’améliorer les conditions d’études et de travail des personnels et des élèves dès l’année prochaine.